Mulch, paillis, paillage… on utilise souvent ces termes pour désigner une couverture du sol. Mais est-ce vraiment la même chose ? Et surtout, à quoi sert le mulch ? Qu’il soit organique, minéral ou synthétique, au potager ou en jardin-forêt, ses avantages sont nombreux. Cette technique se révèle même indispensable en permaculture pour atteindre un écosystème résilient au niveau du sol, capable d’affronter les sécheresses et autres perturbations liées au réchauffement climatique. Je vous explique dans cet article pourquoi mulcher est essentiel et quels matériaux choisir.
Le mulch en permaculture : qu’est-ce que c’est ?
Le mulch est une technique de base en permaculture. Ce terme anglo-saxon désigne une couverture du sol par une couche de matériaux d’origine organique, minérale ou synthétique. À ce titre, le mulch peut être séparé en deux catégories :
- ceux qui vont agrader le sol, le fertiliser, comme les mulchs végétaux ;
- ceux qui protègent le sol mais ne lui apportent pas de nutriments supplémentaires, comme les paillis minéraux et les bâches, par exemple.
Petite précision lexicale : mulch, paillage, paillis… y a-t-il une différence entre ces différents termes ? On les entend souvent pour qualifier tout type de couverture du sol, et pourtant, bien que subtile, la nuance existe ! Ainsi, le paillage, pourtant souvent utilisé, désigne plutôt un mulch à base de paille. Un paillis est un mot générique qui représente essentiellement les couvertures végétales et minérales ; il se rapproche donc le plus du terme « mulch », qui, lui, englobe toutes ces techniques.
Pourquoi mulcher le sol ?
Mulcher pour imiter la nature
Pour savoir pourquoi le mulch est si important en permaculture et dans la création d’un jardin-forêt, il faut d’abord comprendre la succession écologique.
Pour rappel, sous nos climats tempérés, les sols nus n’existent pas. La nature reprend systématiquement ses droits, si on la laisse faire. En effet, le sol contient des graines qui, à la lumière, vont pousser et initier ce qu’on appelle la succession écologique. Les plantes pionnières vont apparaître dans un premier temps. Qualifiées, régulièrement et à tort, de « mauvaises herbes », elles poussent pour corriger un déséquilibre du sol. Voilà pourquoi on dit de ces herbes qu’elles sont bio-indicatrices, car elles peuvent permettre de connaître la nature de ce dernier.
Si on laisse la succession écologique opérer au fil du temps, sans intervention, les herbacées seront entourées progressivement d’arbustes, de petits arbres, puis d’arbres plus grands jusqu’à atteindre le stade ultime dans nos contrées : la forêt, l’écosystème naturel le plus résilient qui soit.
Le sol forestier est donc celui vers lequel la nature tend naturellement : humifère, vivant, couvert de bois et de feuilles qui vont naturellement le nourrir. Le mulch a donc pour objectif d’atteindre une composition d’humus forestier plus rapidement, avant qu’il ne puisse s’entretenir de lui-même si vous créez une forêt nourricière, par exemple.
Avantages et inconvénients du mulch
Mulcher le sol comporte de nombreux avantages.
- Les mulchs organiques agradent et enrichissent le sol : la matière organique se décompose progressivement, notamment grâce au travail des petits habitants du sol, acteurs de sa fertilité.
- Recouvrir la terre préserve son humidité, en empêchant l’eau de s’évaporer. De ce fait, le mulch restreint les besoins en arrosage.
- En empêchant la lumière de passer, le mulch limite la pousse des adventices, qui pourraient concurrencer vos plantations.
- Mulcher préserve également le sol de l’érosion et d’une compaction provoquée par la pluie. En effet, en tombant, la pluie désagrège les particules de surface et les agglomère sous forme de croûte, appelée croûte de battance, ce qui peut affecter la perméabilité du sol.
Toutefois, le mulch peut présenter certains inconvénients, comme la présence de limaces ou de rongeurs. Ces défauts peuvent être compensés, voire annulés, en prêtant attention à la composition de votre paillis, qui doit correspondre à vos besoins et à ceux de votre terrain. À noter qu’on observe également une réaction appelée « faim d’azote », si le mulch est composé uniquement de bois broyé vert ; en se décomposant, il mobilise l’azote du sol aux dépens des cultures alentour. Ce phénomène dure environ un mois, attention donc si vous le placez près de jeunes plantations durant ce laps de temps. Dans la nature, il existe un équilibre entre la quantité de carbone (matière brune, sèche) et la quantité d'azote (matière verte, fraîche). La décomposition parfaite s'accélère avec 2/3 de matière carbonée et 1/3 de matière azotée. Un excès de carbone, comme un broyat sans feuille sur un grand tas, peut prendre 18 mois pour se décomposer, tout comme un excès d'azote, type tas de fumier de vache. Dans la composition d'une haie, par exemple, vous pouvez mulcher avec une brouette d'herbe de tonte pour deux brouettes de paille, pour garantir l'équilibre.
Composition du mulch
Mulch organique
Le mulch organique se compose de matières végétales qui, en plus de protéger le sol, vont se décomposer pour enrichir le sol. Il existe plusieurs types de paillis végétaux.
Vous pouvez pratiquer la technique du Chop and Drop - « attraper et déposer » - qui consiste à arracher des herbes dites indésirables, ou tailler des arbres et arbustes à croissance rapide, et laisser les feuilles, tiges et branches sur place. La consoude est de plus en plus plébiscitée pour remplir ce rôle : cette vivace se taille plusieurs fois dans l’année et fournit donc quantité de matière, en plus de vous faire profiter de ses vertus médicinales et de son intérêt nutritionnel.
Dans le cadre d’une production maraîchère sans travail du sol, on peut ainsi étudier la possibilité de produire une quantité de biomasse suffisamment importante pour « produire » son propre mulch, grâce au Chop’n Drop.
Le mulch végétal peut aussi être composé de débris végétaux :
- tontes d’herbes, séchées au préalable pour éviter le risque de fermentation ;
- feuilles mortes ;
- bois raméal fragmenté, ou BRF, c’est-à-dire du broyat de jeunes rameaux ;
- paillis de lin, de chanvre, etc.
En se décomposant, les matières organiques vont fertiliser et améliorer la structure du sol, tout en protégeant les micro-organismes qui y travaillent.
Toiles et feutres
Selon moi, il s’agit de la meilleure solution pour de vastes surfaces, elle est donc tout indiquée pour créer votre jardin-forêt, à condition qu’il n’y ait pas de cultures déjà en place, ce qui rendrait la manœuvre plus difficile.
Toile végétale tissée, feutre ou encore film plastique, ils présentent l’avantage, en plus de protéger le sol, de retenir les terres sur un terrain en pente ou sur les berges d’un plan d’eau. Le paillis en toile plastique réchauffe aussi le sol plus précocement, ce qui permet de semer plus tôt dans la saison.
Enfin, le paillis en carton, sans encre ni colle, est également tout à fait indiqué pour protéger votre sol. Très économique, il vous faudra, en revanche, le changer régulièrement - environ trois fois par an - car il se dégrade assez vite.
Mulch minéral
Dans cette catégorie, on retrouve la pouzzolane, le paillis d’ardoise, la brique broyée, les galets… Souvent très esthétique, il s’agit du paillis le plus durable. En revanche, il est aussi le plus onéreux et difficile à mettre en œuvre sur de grandes surfaces.
Quel matériau choisir pour son mulch ?
Devant un choix si vaste, vous vous demandez quel est le mulch le plus adapté chez vous ? Là encore, en permaculture, la clé est d’observer et analyser vos besoins et ceux de votre terrain pour pouvoir faire votre choix.
Mulcher 50 m2 de potager ne se fait pas de la même façon que de pailler 2 ha de future forêt-jardin ! Vous pouvez, par ailleurs, dans une démarche permacole, vous inspirer des ressources disponibles sur place ou à proximité.
Ensuite, vos objectifs détermineront le type de mulch dont vous avez besoin. Nous avons nous-mêmes opéré ce choix lors de la plantation de notre forêt jardin, après avoir comparé les différents types de paillis, leur coût et leur bilan énergétique, notre objectif étant avant tout de réussir notre jardin forêt sans arrosage, en travaillant avec la condensation.
Je vous livre d’autres conseils pour réussir votre forêt-jardin en permaculture malgré le réchauffement climatique dans cette vidéo. À très bientôt et, d'ici là, plantez votre abondance !